Comment rénover un bâtiment historique protégé ?

Alors que l’on parle de plus en plus de la rénovation énergétique des bâtiments, qu’en est-il des bâtiments historiques protégés? A première vue, il paraît impossible d’atteindre une performance actuelle pour un bâtiment du passé. Détrompez-vous, Lutz Architectes a réussi l’exercice à plusieurs reprises. Voici les principes de base pour concilier rénovation énergétique et protection du patrimoine.

L’immobilier consomme près de 50% de l’énergie en Suisse. Pour réduire cette part, la Confédération encourage la rénovation énergétique des bâtiments. La proportion de bâtiments dignes de protection s’élève à 10 à 15% en Suisse. Cette part n’est pas négligeable et il convient de réfléchir à la rénovation de ces bâtiments également.

> Mais la rénovation énergétique est-elle compatible avec la protection du patrimoine ?

Economie d'énergie et protection du patrimoine: des principes parfois contradictoires

Au premier abord, la réponse semble être négative. Comment isoler un ancien bâtiment sans lui faire perdre son âme et son caractère ? Les deux domaines sont régis par des lois et règlements aux niveaux fédéral, cantonal et communal. Il arrive effectivement qu’il y ait des contradictions entre eux. Il convient alors de procéder à une pesée des intérêts.

L'équilibre à trouver entre les exigences patrimoniales et énergétiques impose un dialogue précoce entre les différents intervenants: propriétaires, organes de financement, unités administratives concernées. La solution finale sera le fruit de ce consensus entre le maître d'ouvrage et les deux services spécialisés.

Les façons d’isoler un bâtiment protégé

Améliorer la performance énergétique d’un bâtiment protégé est plus compliqué qu’un bâtiment standard. Poser une couche d’isolation périphérique crépie sur une façade centenaire n’est tout simplement pas possible car cela altérera fortement le caractère du bâtiment. Heureusement, il existe d’autres options pour mieux isoler ces bâtiments. Les pertes thermiques se font par différents biais : les façades, mais également la toiture, les sous-sols ou les fenêtres. On peut agir sur ces éléments et laisser la façade en l’état. Dans tous les cas, il s’agit de bien évaluer les mesures prises sur la physique du bâtiment. En agissant sur les fenêtres par exemple, on peut changer l’équilibre naturel du bâtiment et provoquer des problèmes d’humidité.

Isoler correctement la toiture permet de réduire déjà fortement la consommation d'énergie d'un bâtiment, à l'image d'un couvercle sur une casserole. Dans cette maison de maîtres à Neuchâtel, les combles froids ont fait place à un appartement cosy et très bien isolé. 

Des panneaux solaires photovoltaïques pour les bâtiments historiques

Les installations solaires sur des biens culturels ne sont pas interdites. Mais la loi sur l’aménagement du territoire LAT (article 18a) prescrit qu’elles sont soumises à autorisation. Une innovation du centre de recherche en microtechnique de Neuchâtel CSEM permettra peut-être à l’avenir de voir plus de bâtiments anciens fonctionner aux énergies solaires. Les chercheurs ont développé des panneaux solaires couleur terracotta  comme les tuiles traditionnelles. Pour prouver l’impact visuel limité de cette technologie, un test a été mené en collaboration avec le Service des biens culturels de Fribourg et Lutz Architectes. Le toit d’une ferme à Ecuvillens a été revêtu avec ces panneaux photovoltaïques. La réalisation a été validée et cette solution est maintenant disponible pour d’autres projets. Une bonne nouvelle pour les bâtiments de centres historiques !

Des panneaux photovoltaïques couleur tuiles constituent une bonne alternative pour les toits de bâtiments protégés.

La réversibilité: principe de base de la protection patrimoniale

Dans le domaine de la protection du patrimoine, un principe de base règne en maître: la réversibilité. C’est à dire que toute intervention actuelle dans un bâtiment historique doit être réversible sans occasionner de dégâts. On doit pouvoir revenir à l'état initial du bâtiment sans traces de l'intervention. Cela complique la rénovation. L’architecte doit parfois être ingénieux pour trouver des solutions afin d’intégrer la technique actuelle dans un bâtiment du passé.

Des subventions pour la protection du patrimoine et la rénovation énergétique

Les propriétaires de biens protégés peuvent obtenir des subventions pour réaliser leurs travaux. Dans le domaine de la protection du patrimoine, il existe des subventions fédérales et cantonales relatives au degré de protection de l’objet. Les conditions pour en bénéficier sont différentes dans chaque canton, mais en principe, seuls les travaux de conservation-restauration font l’objet d’un soutien financier. L’entretien courant et les mesures destinées à garantir la sécurité publique n’entrent par exemple pas dans le cadre des subventions.

> Renseignez-vous auprès du service en charge du patrimoine de votre canton. Vous trouverez la liste des différents offices ici : nike-kulturerbe.ch. Les propriétaires ont également droit aux subventions du Programme Bâtiments pour la rénovation énergétique des bâtiments.

Se faire conseiller par un architecte expérimenté

Faire  appel au service de protection du patrimoine dès le début du projet facilite le déroulement des travaux de rénovation. En effet, selon la loi, celui-ci prend position quant au projet dès le dépôt de la demande de permis de construire. Mais comme propriétaire d’un bâtiment protégé à rénover, on a tout intérêt à s’entourer d’un architecte ayant une expérience dans le domaine. Vu la difficulté de l’exercice, c’est lui qui fera le lien entre les autorités et le maître d’ouvrage.

Source: Énergie et monuments historiques, Commission fédérale des monuments historiques / Construire en tenant compte de la protection du patrimoine, Infomaison / Patrimoine et Energie, Concilier bâti historique et exigences en matière de consommation d’énergie, Suisse Energie

Comment rénover un bâtiment historique protégé: présentation des principes de base

Cette maison de maîtres en ville de Neuchâtel a réduit ses émissions de CO2 de 90% tout en préservant son caractère patrimonial.

«Une rénovation réussie est celle qui préserve la substance historique tout en améliorant à long terme l’efficacité énergétique du bâtiment. La durabilité est le résultat de cet équilibre. »

Énergie et monuments historiques Commission fédérale des monuments historiques

Description :

Découvrez cet exemple de rénovation d'un bâtiment historique protégé qui prouve qu'il est possible de concilier protection du patrimoine et protection du climat. Fabrice Macherel, directeur associé de Lutz architectes, y explique comment cette maison du 18ème siècle a été rénovée selon les exigences strictes de Minergie-Eco.

Couleurs Locales, RTS